«
Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des
pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux » (Matthieu 5,20)
Chers frères et sœurs, que la paix et
l’amour du Christ soient avec vous !
Alors
que nous avançons dans ce temps saint du Carême, les paroles de Jésus dans
l’Évangile d’aujourd’hui nous touchent au cœur même de notre appel à la
conversion et au vrai disciple. Le Carême est un temps d’examen de conscience,
une saison où la grâce de Dieu nous façonne en véritables enfants du Royaume.
Aujourd’hui, Jésus nous lance un défi qui a dû sembler choquant à ses premiers
auditeurs : « Votre justice doit dépasser celle des scribes et des
pharisiens ! » Que signifie cette exigence ? Comment pouvons-nous
aller au-delà du rigorisme religieux de ceux qui étaient réputés pour leur
stricte observance de la Loi ?
Le
Cœur de la Justice (dikaiosýnē)
Le
mot que Jésus utilise pour « justice » (dikaiosýnē) ne se limite pas au
respect des prescriptions légales ; il désigne une relation juste avec Dieu et
avec les autres. La justice dont parle Jésus ne consiste pas en une simple
conformité extérieure aux pratiques religieuses, mais en une transformation intérieure,
un cœur qui cherche la sainteté non par obligation, mais par amour. Les
pharisiens observaient la Loi avec rigueur, mais leur cœur restait souvent
froid et éloigné de l’esprit même de cette Loi (cf. Matthieu 23,27).
Jésus nous appelle à aller plus loin : à une justice qui naît d’une communion
intime avec Dieu, à une vie marquée par la miséricorde, la justice et
l’humilité (Michée 6,8).
Le
Véritable Sens de « Tu ne tueras pas » (phoneúō)
Jésus
dépasse l’interprétation littérale du cinquième commandement : « Tu ne
tueras pas » (Exode 20,13). Il enseigne que la vraie justice ne se
limite pas à éviter l’homicide, mais consiste à extirper de nos cœurs toute
racine de colère, de ressentiment et de haine.
- Le verbe grec phoneúō, qui signifie «
tuer », ne se limite pas au meurtre physique, mais englobe toutes les
manières dont nous blessons, détruisons ou diminuons autrui.
- Nous ne sommes peut-être pas coupables de
meurtre, mais combien de fois avons-nous « assassiné » quelqu’un par nos
paroles, nos jugements, nos calomnies ou notre indifférence ?
- Le Carême est un temps pour confronter non
seulement nos péchés extérieurs, mais aussi les péchés cachés du cœur :
les rancunes silencieuses, les froideurs relationnelles, les ressentiments
persistants qui nous éloignent de Dieu et de nos frères.
Se
Réconcilier Avant d’Offrir : L’Urgence de la Paix (diallassomai)
Jésus
nous interpelle sur le véritable sens de l’offrande : « Si donc tu présentes
ton offrande à l’autel et que là, tu te souviens que ton frère a quelque chose
contre toi, laisse là ton offrande et va d’abord te réconcilier avec lui
» (Matthieu 5,23-24). Ici, le verbe grec diallassomai signifie
bien plus qu’une simple réconciliation superficielle : il désigne une
restauration profonde de la relation.
- Dans la culture juive, l’autel était le lieu le
plus sacré de la rencontre avec Dieu. Or, Jésus affirme que la
réconciliation humaine doit passer avant même l’acte d’adoration !
- Comment pouvons-nous nous tenir devant Dieu
avec un cœur rempli de rancune ? Comment pouvons-nous lever les mains dans
la prière tout en tenant fermement le poids du ressentiment ?
- En ce Carême, Jésus nous appelle à l’urgence du
pardon. La réconciliation n’est pas facultative ; elle est le chemin même
qui nous conduit au cœur du Père (cf. Matthieu 6,14-15).
Se
Réconcilier Sans Tarder : La Sagesse de la Miséricorde
Enfin,
Jésus nous avertit : « Accorde-toi vite avec ton adversaire, tant que tu es en
chemin avec lui » (Matthieu 5,25). L’« adversaire » ici peut désigner
ceux que nous avons offensés, mais aussi notre propre conscience, qui témoigne
contre nous devant Dieu. Nous ne devons pas retarder la réparation des torts,
car nous ne savons pas combien de temps il nous reste. Le Carême est une saison
de grâce, une opportunité pour adoucir notre cœur avant qu’il ne soit trop
tard.
Aujourd’hui
est le jour du pardon.
Aujourd’hui
est le jour de la guérison.
Aujourd’hui
est le jour de nous libérer des blessures du passé et d’embrasser la
miséricorde libératrice du Christ.
Un
Appel à une Conversion Authentique
Chers frères et sœurs, Jésus ne nous
demande pas une religiosité de surface, mais un amour radical :
- Un amour qui purifie le cœur de toute colère.
- Un amour qui fait passer la réconciliation
avant des offrandes vides de sens.
- Un amour qui reflète la miséricorde du Père.
C’est cette justice qui surpasse celle
des scribes et des pharisiens. C’est cette justice qui ouvre les portes du
Royaume.
Alors que nous poursuivons notre chemin de
Carême, examinons nos cœurs :
ü Gardons-nous des rancunes ou des ressentiments ?
ü Notre adoration est-elle enracinée dans un cœur pur ou
réduite à une simple observance extérieure ?
ü Sommes-nous prêts à faire le premier pas vers la
réconciliation ?
Le
moment, c’est maintenant ! Le Christ frappe à la porte et nous appelle à une
justice plus grande, une justice née de l’amour. Embrassons son appel et
laissons-nous transformer de l’intérieur.
«
Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Matthieu 5,7).
Amen.
Comment pouvons-nous lever les mains dans la prière tout en tenant fermement le poids du ressentiment? Demandons à Dieu la grâce du pardon offert et reçu.
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