Friday, April 18, 2025

« Il n’y a pas d’amour plus grand que celui‑ci ».

Chers amis, aujourd’hui nous méditons le plus solennel des après‑midis du calendrier chrétien. L’Église paraît dépouillée, silencieuse. Nous ressentons un mélange de stupeur, de tristesse, mais surtout une profonde gratitude pour l’amour immense que Dieu nous a manifesté en Jésus‑Christ. Parmi les nombreux passages bibliques proposés au cours de ce Triduum pascal, je voudrais m’arrêter sur deux versets : Jean 13,1 et Jean 15,13.

« Il les aima jusqu’au bout » (Jn 13,1) »

Saint Jean place cette phrase comme un en‑tête de tout le récit de la Passion : « Lui qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout. » En grec, eis telos signifie à la fois « jusqu’au dernier souffle » et « jusqu’à la limite extrême ». Jésus ne ménage pas son affection ; il la répand comme l’eau du bassin lorsque, à genoux, il lave des pieds fatigués et poussiéreux , un travail d’esclave accompli par le Maître de l’univers. Il a tout donné pour que nous soyons réconciliés avec Dieu.

Saint Augustin disait : « La mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure. » Lorsque nous contemplons le Calvaire, nous voyons un amour qui bat tous les records, un amour sans limite. Chaque coup de fouet, chaque pas douloureux, chaque goutte de sang crie : « Je ne t’abandonnerai jamais. » La Passion et la Mort de Jésus sur la croix sont la plus belle lettre d’amour que Dieu nous ait écrite.

« Il n’y a pas de plus grand amour… » (Jn 15,13)

Quelques heures après le lavement des pieds, sur le chemin de Gethsémani, Jésus se tourne vers ses amis : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. » Les apôtres ne le comprennent pas encore, mais il signe déjà l’acte de donation de sa propre vie.

Les Pères de l’Église ont abondamment commenté la Passion. Saint Grégoire le Grand fait remarquer une chose remarquable : Jésus aurait pu réduire ses ennemis au silence d’un seul mot, mais il a choisi de se taire pour nous donner la parole. Voilà la véritable puissance de l’amour : une force tempérée par la miséricorde ; l’unique amour qui sauve vraiment.

Et observez qui il appelle « amis » : non pas des disciples parfaits, mais des compagnons fatigués et somnolents qui, bientôt, le renieront, le trahiront, l’abandonneront. S’il y a une place pour eux au pied de la croix, il y en a aussi pour chacun de nous.

Il nous avait prévenus (Mt 17,22‑23) : trois fois sur la route de Jérusalem, Jésus a pris les Douze à part pour leur annoncer dans le détail qu’il serait livré, bafoué, mis à mort, et que le troisième jour il ressusciterait. Les clous mêmes qui le fixent proclament la solidité de ses promesses.

Ce message rejoint nos vies. Lorsque nous affrontons la souffrance , maladie, deuil, angoisse , nous demandons souvent : « Pourquoi ? » Quand il nous semble que Dieu se tait, souvenons‑nous du cri de Jésus sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as‑tu abandonné ? » En ce cri se récapitule toute expérience humaine de l’abandon, de l’agonie, de la mort. Le Vendredi saint ne répond pas à toutes nos questions, mais il révèle qui se tient à nos côtés dans nos nuits, portant nos fardeaux et nous assurant : « Les ténèbres n’auront pas le dernier mot. »

Saint Éphrem le Syrien décrivait la croix comme « l’arbre qui a fleuri dans le sang afin que le paradis refleurisse ». Bernard de Clairvaux nous invite : « Contemple les plaies du Christ ; tu y liras son cœur. » Catherine de Sienne s’écrie : « Ô brasier de charité ardente ! Quel cœur fut jamais consumé aussi totalement par amour pour ses créatures ? » Thérèse de Lisieux murmure tendrement : « Il m’a aimée et s’est livré pour moi. »

Ces voix de la tradition nous rappellent que la croix est un don si personnel qu’elle porte chacun de nos noms.

À l’exemple de Marie et de Jean, approchons‑nous. Apportons nos péchés, nos regrets, nos relations brisées pour qu’ils soient crucifiés avec lui. Laissons sa manière d’aimer inspirer nos actes : Pardonner ceux qui ne s’excuseront peut-être  jamais. Servir discrètement, sans attendre de reconnaissance. Rester auprès de la croix de quelqu’un, même si nous n’avons que notre présence à offrir.

Une petite histoire illustre cette vérité : une infirmière racontait qu’un patient redoutait de mourir seul. Elle resta à son chevet toute la nuit, lui tenant la main. Au matin, il était parti, mais son visage rayonnait de paix. Cette infirmière a incarné ce que Jésus fait pour le monde entier aujourd’hui : refuser que quiconque souffre dans la solitude.

Prions :
Seigneur Jésus, tu nous as aimés jusqu’au bout et tu as donné ta vie pour tes amis.
Apprends à nos cœurs agités la vraie force de l’amour livré.
Que le souvenir de tes plaies guérisse les nôtres, que ton silence nous donne courage dans nos peurs, et que la promesse de ta résurrection allume en nous l’espérance. Amen.

« Nous t’adorons, ô Christ, et nous te bénissons, car par ta sainte croix tu as racheté le monde. »

Que ce Vendredi saint nous rapproche toujours plus de cette croix rédemptrice, afin que, lorsque l’aube de Pâques se lèvera, nos cœurs soient renouvelés.

 


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